Les vrais impacts de la hausse du taux de qualification hypothécaire

Source: www.journaldemontreal.com

 

Le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) a annoncé la semaine dernière qu’au 1er juin, le taux de qualification passerait de 4,79 % à 5,25 % pour les hypothèques non assurées.

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Beaucoup d’encre a coulé depuis sur le sujet, mais l’impact de ce changement passera largement inaperçu.

Dans un contexte où le marché immobilier est en surchauffe, on croit sur le coup qu’il s’agit d’une tentative de calmer le jeu. Mais quand on y pense un peu, on a du mal à voir comment ce resserrement des règles peut atténuer la frénésie actuelle.

Oui, oui, la hausse du taux de qualification touchera du monde, mais pas ceux qu’on croit.

Une marge de sécurité

C’est à peine depuis 5 ans (la durée d’un terme hypothécaire) que cette mesure d’encadrement existe. Le principe n’est pas sorcier. Lorsqu’on vous accorde une hypothèque, on fait comme si le taux d’intérêt était plus élevé que celui qu’on vous accorde. Comme ça, on s’assure que vous serez toujours capable de rembourser le prêt si les taux se mettaient à monter.

Avant 2016, une marge de sécurité était appliquée de manière plus ou moins informelle, avec plus ou moins de sévérité, selon les prêteurs. Quand le BSIF a normalisé et imposé cette pratique, ç’a donné un grand coup. Depuis, elle y apporte des ajustements, mais comme on peut le constater, cela n’a pas permis de contenir tous les excès.

La modification annoncée la semaine dernière touche les hypothèques non assurées (dites « conventionnelles »), le taux de qualification passe de 4,79 % à 5,25 %, ce qui réduit la capacité d’emprunt.

Mais voilà, presque toutes les nouvelles hypothèques sont assurées. C’est vrai que les premiers acheteurs qui arrivent avec 20 % de mise de fonds ne sont pas obligés de verser une prime à la SCHL, mais les prêteurs feront néanmoins assurer ces créances à leurs frais (je vous épargne les raisons, c’est un autre sujet).

Bref, les premiers acheteurs ne sont nullement affectés par la hausse du taux de qualification, pas plus que les 2es et 3es acheteurs qui arrivent avec de grosses mises de fonds. Mais qui donc est concerné ?

Refinancement hypothécaire

Essentiellement, ce sont les propriétaires qui veulent « réhypothéquer » leur maison qui seront touchés. Et pas tous !

Quand on veut dégager de l’argent d’une maison partiellement payée, il faut passer par le refinancement. L’opération permet par exemple de faire une mise de fonds sur un chalet, de rénover sa cuisine, d’acheter un véhicule récréatif (VR), de consolider ses dettes… ou, comme le veut la légende, de lancer la carrière de Céline Dion.

Or, dans une opération de refinancement, le prêt hypothécaire n’est pas assurable.

« J’ai calculé que les gens concernés verraient leur capacité d’emprunt [sur leur propre maison] réduite de 4,5 % environ », affirme Denis Doucet, porte-parole du courtier hypothécaire Multi-Prêts. Les propriétaires qui demandent un refinancement dans le but d’accéder à une marge de crédit hypothécaire ne sont pas concernés, selon l’expert, « car ils sont déjà soumis à un taux de qualification plus élevé, autour de 5,30 % ». Le resserrement annoncé par le BSIF ne stoppera pas la surenchère sur les maisons à vendre, mais il pourrait réduire (à peine) les ardeurs des rénovateurs, déjà refroidies par des hausses du prix des matériaux.

POUR AMÉLIORER VOS CHANCES DE QUALIFICATION

  • Les hypothèques assurées sont aussi soumises à un taux de qualification, inchangé à 4,79 %. Ces règles font qu’au Canada, les prêts hypothécaires de mauvaise qualité (subprimes) sont beaucoup moins nombreux qu’aux États-Unis.
  • Le marché canadien de l’hypothèque est bien encadré, ce qui nous protège en bonne partie des dérives auxquelles on a assisté aux États-Unis il y a une douzaine d’années.

Rappelons quelques conseils pour faciliter la qualification :

  • Réduire ses dettes (ou ne pas les augmenter) avant de demander un prêt hypothécaire.
  • Verser une mise de fonds plus importante.
  • Acheter à deux.

 

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